jeudi 18 février 2010

CARNAVAL



Mi-février, c’est la période de carnaval un peu partout en Amérique Latine. Les plus connus sont celui de Rio et de Bahía au Brésil et celui de Baranquilla en Colombie. Mais ils ne sont pas les seuls à faire la fête. En Equateur, les quatre jours de Carnaval (du 13 au 16 février) mettent tout le pays en arrêt. On me prévient, Carnaval est la période la plus folle de l’année. Je ne sais pas trop en quoi ça consiste, mais j’allais vite comprendre.

Avec quelques amis on décide d’aller passer Carnaval sur les plages au nord de Manta (Canoa et San Clemente). Mais pas de n’importe quelle manière : en mode al dedo (voyager en stop) et camping sur la plage. Bon en Europe, comme cela coûte toujours très cher dès qu’on veut se déplacer ne serait-ce que deux kilomètres, que ce soit en voiture, train, avion, tricycle, le stop est un moyen de faire de vraies économies. En Equateur, pour les quelques 10 dollars qu’on a du économiser, c’est plus pour l’aventure qu’on l’a fait. C’est assez facile car beaucoup de familles voyagent en camionnette et peuvent nous prendre à l’arrière, et on passe toujours de très bons moments. Surtout quand on se retrouve à l’arrière d’un camion qui transporte des motocross et des fruits ou qu’on est en train d’attendre sous la pluie en compagnie des moustiques. Forcément, ça rapproche les gens.





Mes amis sont très formels sur une règle me concernant : c’est à moi d’arrêter les camionnettes. Camille, c’est à toi de jouer. Camille ne va pas faire pipi maintenant, il y a une camionnette qui arrive et il faut que tu l’arrêtes. «Francesa », on t’a dit de te mettre devant tout le monde pour arrêter les voitures, et montre un peu de jambe si tu peux. J’ai bien cru qu’ils allaient me mettre un panneau «française» autour du cou en pensant que ça allait peut être nous aider. Bon allé, un pour tous et tous pour un non?

L’autre règle de carnaval, c’est qu’il y a très peu de règles. C’est tout et n’importe quoi. Et avant tout, le droit de jeter à peu près tout ce qu’on veut sur les passants. Les batailles d’œufs et de farine qu’on se fait à la sortie du lycée en France ne sont rien à côté de ce que l’on vous jette en Equateur. Je me prends des bassines entières d’eau de mer (avec les algues), des œufs dans les cheveux, des jets de mousse toutes les cinq minutes, de la boue, de la bière, du whisky. C’est un peu la fête du «tout-est-permis». Bref, je ne passe pas une seule minute entièrement sèche ou propre des quatre jours.

Il faut évidemment le prendre avec bonne humeur et prendre plaisir à riposter. Et oui je viens de me laver, je suis enfin propre et je sens bon, c’est bien con de me faire verser un litre de bière sur la tête à peine un quart d’heure plus tard. Il faut s’y attendre. Tous les équatoriens sortent dans la rue avec leurs munitions durant les quatre jours de carnaval et s’amusent à se lancer toutes sortes de choses. J’en ai vu se faire trainer dans la boue par leurs amis.



Et franchement, ça fait du bien de pouvoir se permettre d’être aussi crade. On se sent un peu comme quand on était enfant et qu’il nous était permis de se trainer dans le sable ou de se renverser de la glace sur le t-shirt. De toute manière, il est impossible de ne pas se salir. Les rues de Canoa, et encore plus de San Clemente, sont boueuses et glissantes à force de toutes les batailles d’eau qu’elles voient, le camping sur la plage nous ramène du sable à peu près partout, et on a beau courir pour éviter de se prendre ce maudit jet de jus de pastèque qui colle et tâche, il y aura forcément quelqu’un d’autre vingt mètres plus loin pour nous lancer je ne sais quelle horreur bien gluante.

San Clemente est très petit, pourtant je n’ai jamais vu d’endroit aussi bondé et sale de toute ma vie. Ca devait être probablement pire que Woodstock 69. Le soir, certaines parties sont tellement chargées de gens qu’on se croirait dans la fosse d’un concert de Metallica. On glisse dans la boue, on tombe dans des flaques d’eau, on a de la crasse qui nous monte jusqu’aux genoux. Dans les rues, les gens marchent dans toutes les directions en files bien serrées; on n’a à peine d’espace pour poser les pieds et le plus souvent, on se marche les uns sur les autres. Avec mes amis, on se met en queue-le-le et on s’amuse à faire des allers-retours dans ces passages étroits bondés de fêtards qui nous jettent de la bière. Et nous, on rétorque avec des bombes à mousse.



Les quatre jours ne sont que playa, folie et fiesta 24 heures sur 24 : tout le monde danse dans la rue et sur les plages à n’importe quelle heure de la journée, la bière coule à flots, on se fait des séries en boucle de «Tonight’s gonna be a good night» des Black Eyed Peas et à partir de deux heures du matin, on se pose autour d’un feu sur la plage jusqu’à l’aurore. C’est assez incroyable comme expérience ces fêtes de Carnaval, de loin les meilleures parmi toutes celles que j’ai pu connaître en Equateur, mais j’ose dire qu’une fois par an doit bien suffire. Maintenant si vous voulez bien, je me mets en ermitage pendant un mois histoire de récupérer.

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