mercredi 10 février 2010

CRONICAS BOLIVIANAS

Suite des cronicas peruanas... aprés le Perou, la Bolivie...


Avant de parler du pays même, parlons frontière. Nous arrivons sur les coups de six heures du matin à Desaguadero, ville frontière de passage entre le Pérou et la Bolivie. Ce que les Boliviens appellent une frontière de migration, moi j’appelle ça un bordel crotté humano-animal. Quatre heures de queue au milieu du marché de Desaguadero, où tout un chacun t’interpelle, veut te vendre un morceau de porc ou un CD piraté de danse cumbia, tandis que des mecs louches te proposent de s’occuper de tous tes papiers de migration pour quelques dollars. Evidemment, ne pas faire confiance à ces derniers, ils ne cherchent qu’à vous voler votre passeport. J’ai en plus la fortune de connaitre le record des chiottes les plus crasseux d’Amérique Latine, une sorte de grosse marmite reliée par je ne sais quel miracle à une plomberie semi-sous-terraine au milieu d’une flaque de boue et entouré de quatre murs en carton. Ne me demandez pas comment se tire la chasse, j’ai beau eu la chercher, je ne l’ai jamais trouvée…

Si un jour vous avez donc cette grande chance de traverser par voie routière la frontière bolivienne, suivez le mode d’emploi suivant : bien écouter les directions préalables que vous aura donné le chauffeur de bus, descendre du bus avec toutes vos affaires, aller le plus vite possible vous mettre dans la queue de migration, traverser la frontière à pied et rejoindre le bus qui vous attend de l’autre côté.

NE PAS FAIRE le suivant :

· Prendre dix minutes à descendre du bus parce que vous cherchez une nectarine au fond de votre sac

· Vous perdre dans le marché de Desaguadero

· Ne pas vous renseigner sur les obligations de visa en Bolivie avant votre voyage

Dans ma défense, ma seule erreur à moi a été de me perdre accidentellement dans le marché, à la recherche d’un vendeur de jus de fruit. Jessica était coupable des deux autres erreurs. J’étais évidemment furieuse qu’elle prenne son temps à descendre du bus, stressée à l’idée d’être dans les derniers à faire la queue et que le bus nous oublie, ce qui n’est pas inconcevable en Amérique du Sud. Mais la cerise sur la crème chantilly du gâteau, c’est les agents de migration boliviens qui crachent à la face de Jessica « Americana ? 135 dólares por favor ». Puis regardant mon passeport, « Aaaa Francia! Bienvenida a Bolivia mi amor! ». Jessica a le regard tellement noir de fureur qu’on dirait qu’elle a des couteaux qui lui sortent des yeux. S’ensuit un débat de quinze minutes sur la politique américaine vis-à-vis de la Bolivie et des vicissitudes de la diplomatie qui l’obligent à payer un visa de 135 dollars pour séjourner 5 jours dans le pays. De mon côté, je suis à deux doigts de me donner une crise cardiaque en courant plusieurs aller-retour entre le poste de migration et le bus qui se trouve 500m plus loin pour les supplier de bien vouloir nous attendre, tandis que Jessica remplit une dizaine de formulaires et manque de massacrer l’agent quand il refuse ses dollars parce qu’ils sont un peu déchirés.

Tout finit bien. Jessica entre en Bolivie après avoir payé à contre cœur son visa et exprimé ses vues sur les lois de migration boliviennes. Le chauffeur de bus non seulement nous attend, il prend une heure de plus pour aller faire une sieste. Dans la foulée, on fait connaissance avec Mike, américain qui, lui, avait eu l’intelligence de se renseigner sur les visas, mais reste solidairement avec Jessica durant tout le long de la procédure de migration. Nous sommes tellement reconnaissantes qu’il ait risqué de rester abandonné par le bus à la frontière avec nous que nous lui proposons de passer la journée avec nous à La Paz, si tant est qu’on y arrive en un seul morceau…


Etape n°5 – LA PAZ. J’appréhende un peu les deux jours de séjour à La Paz, pour deux raisons principalement.

· Primero, j’ai peur que la ville soit un peu dangereuse. Me baladant avec mon passeport, ma carte de crédit, mon appareil photo et 8 autres kilos d’affaires qui, du moins à MES yeux, sont des affaires importantes, je n’ai pas trop envie d’attirer l’attention.

· Segundo, je n’ai aucune idée de ce qu’il y a à foutre à La Paz. C’est vrai qu’on y va un peu au hasard sans trop s’être renseignées sur la ville.

Mais une fois de plus, le valeureux Mike vient à notre secours. Un ami lui a réservé une chambre dans un quartier où se trouvent de nombreux autres hôtels pour backpackers, tout près du centre. Son hostal est complet, mais quelques blocs plus loin, Jessica et moi trouvons une petite merveille pour voyageurs : le Hostal Loki.

Cette auberge de jeunesse pour voyageurs est présente à La Paz en Bolivie, et à Cuzco, Lima et Mancora au Pérou. Pour seulement 7 dollars par jour, on a un lit dans une chambre-dortoire de 6, une salle de bain avec eau chaude, accès gratuit à internet, petit-dej compris, accès à une petite bibliothèque, un bar-restaurant, et une ambiance internationale absolument géniale. Le Hostal grouille de voyageurs de toute part, il est impossible de ne pas y rencontrer du monde. De toute manière, il leur suffisait de me dire qu’il y avait l’eau chaude courante pour me convaincre, mais j’avoue que cet hostal était vraiment au-delà de toute espérance.

On passe l’après-midi avec Mike au « Mercado de Brujas » (marché des sorcières), où je trouve des pulls à 5 dollars, des pantalons à 6 dollars, des gants, écharpes et bijoux à prix dérisoires. La Bolivie est un pays bon pour la santé budgétaire. Et contrairement à ce que je pensais, l’endroit de la ville où nous nous trouvons est très tranquille.

Le soir même, je jouis de ma première douche chaude en quatre jours. Faisons tout de suite le paragraphe « Hygiène de voyage pour les nuls ». Evidemment, en bon backpacker, lorsqu’on voyage sur petit budget, il ne faut pas trop faire la chochotte et être prêt à faire quelques sacrifices sur l’hygiène. Je vous fais part des techniques de Jessica, pro de la « douche française », pour qui il était amplement suffisant de se laver le visage avec de l’eau, se passer une calinette et parfumer ses vêtements de Febreze. La plupart du temps, lorsqu’on voyage de nuit et que le seul moment qu’on peut consacrer à l’hygiène est dix minutes avant le départ du bus dans les toilettes du terminal, c’est l’unique solution. Ne pas oublier de toujours avoir sur soi ses calinettes et son déodorant, c’est très pratique. Bon toujours est il que dès qu’on a l’occasion d’une vraie douche chaude, on en profite pour se refaire une petite beauté féminine. Le look Yeti puant m’allait pourtant si bien…

Les heures d'attente dans les stations de bus sans douche ni bouffe et par un froid de canard...


Après cette divine toilette, nous décidons de tester la vie nocturne de La Paz. Si vous restez dans un Hostal Loki, je vous conseille de passer une petite heure au bar pour faire connaissance avec des gens. Mike, Jessica et moi rencontrons des australiens avec qui nous sortons au bar « Mongo’s ». La routine du voyageur fêtard de La Paz, je l’apprends par une australienne bien rodée, est de « commencer » la nuit chez Mongo’s jusqu’à trois heures du mat, est ensuite de passer le reste de la soirée chez « Blue » où on peut trouver de la cocaïne pour pas cher. « Aaa bon ? » dis-je l’air intéressée. Hmmm, merci meuf, c’est vraiment sympa mais t’en fais pas, j’ai mon stock de feuilles de coca. Tandis qu’à trois heures pétantes, nos amis s’en vont au « Blue », Jessica, Mike et moi repartons tels trois petits vieux au Loki. Si quelqu’un croit qu’il va me priver d’au moins cinq bonnes heures de sommeil dans un vrai lit avec une couette, il peut toujours se gratter ses fesses de lama. Ce sera peut être la seule nuit reposante que j’aurai en deux semaines.

Etape n°6 – Salar de Uyuni

La Paz a été tout le contraire de ce que j’attendais. Animée, touristique, historique, politique. Elle est aussi bien entendu, comme toute la Bolivie, imprégnée d’une pauvreté très visible et mendiante qui m’a fendue le cœur plus que nulle part ailleurs. Nous y sommes essentiellement restées pour trainailler dans les marchés, nous reposer et sociabiliser. Par flemme, nous sommes malheureusement passées à côté de la Vallée de la Lune qui est un des lieux naturels incontournables de La Paz.

Mais les merveilles naturelles, nous les avons gardées pour le sud-ouest de la Bolivie. Le 23 au soir, nous partons en bus pour Uyuni, petit village au bord du plus grand désert de sel au monde, le Salar de Uyuni. Depuis Uyuni, il est possible de rencontrer une agence de tourisme (il y en a au moins une vingtaine) qui propose des tours de 1 à 5 jours dans le sud-ouest de la Bolivie à travers les différents déserts et lagunes de la région. Nous partons donc le 24 au matin pour un tour de trois jours avec un guide bolivien prénommé Rodrigo et – oulala – un groupe de cinq brésiliens.

Au programme : le cimetière de trains où viennent s’échouer les vieux trains hors service de Bolivie, le Salar de Uyuni, la Isla del Pescado – véritable île de cactus et d’oiseaux sauvage au milieu de nulle part, la Laguna Verde et la Laguna Colorado, les geysers et sources de souffre, ainsi que des gorges, canyons et formations rocheuses impressionnantes.

Cette étape a de loin était l’expérience que j’ai préférée durant tout le voyage. Nous étions isolés de tout, abandonnés à la nature dans une région grande comme la moitié de la France et plus heureux que jamais. Notre guide nous explique que nous nous trouvons dans une partie de la Bolivie qui était autrefois une mer, ce qui explique qu’elle ait gardée de telles formations naturelles. Rodrigo est discret, mais quand on l’invite à venir dans les photos avec nous ou à partager la bouteille de vin qu’on s’est achetés le soir, il devient tout de suite très souriant et bavard. Lorsque je lui tends la bouteille de vin, il me demande de l’excuser et en verse volontairement au sol. La française en moi voit ce geste comme un affront, mais Rodrigo explique que c’est une coutume bolivienne de toujours redonner un peu à la « Pacha Mama », la mère nature. J’en reste très émue. Je n’ai jamais vu un endroit aussi préservé des agressions du monde moderne, aussi beau et paisible, autant en communion avec la nature. En vérité, il n’y a quasiment rien ni personne dans l’espace ou nous circulons. Seulement les 4x4, la cinquantaine de touristes qui comme nous font un tour de plusieurs jours et quelques refuges. Le reste constitue en des étendues de désert, de roches, de plantes et par-ci par-là, des animaux que paraissent n’avoir jamais rien vu d’autre que ce merveilleux environnement.

Là encore, niveau hygiène, il ne faut pas trop en exiger. Une seule salle de bain pour tout un refuge, souvent ni eau chaude ni papier toilette (CONSEIL : lorsque vous voyagez en Amérique Latine, pensez à toujours avoir votre propre rouleau de papier toilette avec vous car la plupart des WC n’en fournissent pas). J’en viens à devoir laver mes vêtements au milieu du désert par 4°C le premier soir dans une bassine. Et oui, c’est ça l’aventure, et on garde le sourire hein.

Trois jours très intenses passent à une vitesse hallucinante. J’ai les oreilles qui résonnent des chansons brésiliennes que nous mettaient nos Brésiliens dans la voiture et des conversations en portugais auxquelles je ne comprenais rien. C’était bien magique comme endroit. Vient la dernière belle étape de notre voyage, le Lac Titicaca qu’on attend avec la même impatience que les autres étapes précédentes.

Etape n°7 – Copacabana & Lac Titicaca

Nous arrivons à Copacabana, petit village au bord du Lac Titicaca – côté bolivien – dans la journée du 27 janvier, jour d’anniversaire de Jessica. Elle racontera plus tard le jour de ses 24 ans comme le jour où s’est collée une belle turista. La pauvre Jessica est malade durant tout le trajet de bus, ce que je ne vous souhaite jamais. Arrivées à Copacabana, on est enchantées par cette minuscule petite ville à taille humaine remplies de marchés de rue et d’artisanat (pour changer…). On se trouve un petit hôtel sympa, avec pour seul défaut qu’il faut prévenir le propriétaire quand nous voulons prendre une douche ou nous laver les dents pour qu’il active l’eau courante. Mais on est désormais habituées à ce genre de petit obstacle, ça ne devient même plus un facteur. Nous dégustons un café dans un petit endroit zen qui s’appelle « The Eagle and the Condor » en fin d’après-midi. On sort fêter l’anniversaire de Jessica le soir au bar « Nemo’s », qui est plus ou moins l’unique bar ouvert tard à Copacabana. Ce soir là, nous avons la chance d’avoir un groupe live de salsa, ce qui tombe bien, Jessica est une passionnée de salsa. Je leur demande de dédicacer une chanson à ma merveilleuse copine de voyage, et en bons sud américains, ils en dédicacent une demi-douzaine. On danse et tous les gens du bar viennent souhaiter un joyeux anniversaire à Jessica, ravie de voir bien tourner cette journée d’anniversaire qui avait commencé douloureusement.

Feliz Cumpleaños Jess!!

Le lendemain, on doit se rendre sur la plage à 8h pour prendre un bateau pour la Isla del Sol sur le Lac Titicaca (nous avions réservé nos places la veille). Le lac est encore couvert de brouillard, mais à partir de 9h30, la brume se disperse et le soleil éclaire une eau bleue-émeraude magnifique. On arrive à la Isla del Sol vers 10h30, et nous avons jusqu’à 15h30, heure de retour de notre bateau, pour visiter la première partie de l’île avec un groupe, puis la traverser de nord au sud (environ 12km). Fastoche, croit-on. Dès les dix premières minutes, je suis trempée de sueur et je suis complètement essoufflée par l’effort. On ne s’en rend pas compte, mais le Lac Titicaca est en altitude. Et la Isla del Sol est composée de montagnes et collines aux pentes très aigues. La traversée de l’île dure environ trois heures, nous arrivons au Sud épuisées, affamées, avec l’impression que nos jambes viennent de vivre la pire torture imposable après deux semaines de backpacking et de bus.

Etapes n°8-9-10 : Le retour à Guayaquil (Cuzco-Lima-Mancora)

De retour à Copacabana après la journée exténuante de la Isla del Sol, on doit déjà commencer le retour à Guayaquil. Ni une petite nuit de repos. On a une heure pour manger un morceau, faire nos sacs et prendre le bus qui nous ramène à Cuzco, où nous avons notre avion pour Lima le samedi 30.

C’est là que commence le débat stressant entre Jessica et moi sur comment faire le retour à Guayaquil. Jessica est raisonnable, elle veut faire un retour rapide et efficace vers Guayaquil sans s’attarder pour arriver dans la matinée du 1er février. Moi je suis tout sauf raisonnable, j’ai plus envie de prolonger le plaisir de voyager jusqu’au bout, je ne suis certainement pas pressée de rentrer. Je veux passer une dernière soirée à Lima avec nos amis de là bas, retourner une journée Mancora, peut être même passer par la ville de Loja (au sud de l’Equateur) avant de remonter à Guayaquil. Jessica propose que l’on se sépare pour faire le retour chacune à sa façon, mais je refuse catégoriquement. Ce voyage on l’a commencé toutes les deux, on va le terminer toutes les deux. Ca veut dire faire du compromis. Allé, réveille toi Camille, tu ne peux pas voyager éternellement et fuir le retour au quotidien. On repasse donc à Lima seulement quelques heures pour prendre une bière avec Manuel and Co. et leur dire aurevoir, passons une journée à Mancora pour profiter un dernier instant de la plage et de l’artisanat hippie, et revenons à Guayaquil le 1er au matin.

Et juste quand je commence à devenir boudeuse et nostalgique de ces deux semaines incroyables de circuit entre le Pérou et la Bolivie, je m’aperçois que cela fait pile poil 5 mois jour pour jour que je suis arrivée en Equateur, et qu’il ne me reste que quatre mois. Tout d’un coup, je suis bien contente d’être là car j’ai envie de profiter au maximum de ma famille, de mes amis et de ce pays que j’aime.



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